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Channel: la traversée de la passion (roman)
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jouets de circonstance

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 La traversée - mécomptes des Noëls…

Jouets de circonstance, 

Petit retour en arrière dans l’histoire de Jean-Marc.
Non seulement sa famille était dans une situation bien proche de la pauvreté, mais les dix premières années de la vie de notre ami se déroulèrent dans un cadre de guerre et de sévères restrictions.
Pour un jeune enfant, cette notion de pauvreté ne signifie pas grand chose. Elle provoque une incompréhension devant certains faits et, à la longue, l’amertume adoucie par la résignation.
La famille de Jean-Marc s’ingéniait, au prix de sacrifices, à fournir aux enfants le nécessaire, la nourriture, les vêtements et un minimum de confort.
Mais un gosse de cet âge-là a besoin pour son développement intellectuel de bien d’autres choses, en particulier de jouets, de jeux et un peu plus tard de livres.
Jean-Marc n’a jamais manqué de revues, de bandes dessinées. Son grand-père du côté maternel (mort hélas trop tôt, avant la fin de la guerre), adorait lui faire découvrir les histoires en lui expliquant les illustrations et en essayant maladroitement de lui apprendre à lire. Sa mère allait fréquemment à la bibliothèque paroissiale de prêt et Jean-Marc avait l’autorisation de feuilleter librement les ouvrages qu’elle en rapportait, impatient de pouvoir enfin déchiffrer l’énigme des lettres et des mots…
Les revues de propagande de toute origine et de toute nature étaient généreusement distribuées pendant l’occupation, (détenir certaines d’entre elles présentait un certain risque). A l’église, après la messe on vendait des périodiques, « Le Pèlerin », « Cœur Vaillant », « Fripounet et Marisette »… La famille se faisait un devoir d’en acheter assez régulièrement.
Mais le problème des jouets se posa bientôt… et  fut imparfaitement résolu. Fêter dignement Noël était un grand souci. Les enfants envoyaient une lettre de « commande » au père Noël, (dans la famille de Jean-Marc on disait « le petit Jésus »), et ils comptaient bien obtenir satisfaction le 25 décembre… Seulement notre jeune ami avait des idées très arrêtées et il n’aurait pas admis la réticence divine. Un de ses premiers désirs fut « des soldats de plomb »… Impossibilité absolue pendant la guerre, ce genre de métal était introuvable, réquisitionné etc. etc. Il reçut de petites quilles en bois ayant une vague allure humaine, mais rien de martial. Grosse déception et beaucoup d’interrogations.
L’année suivante, même demande et attribution de silhouettes de militaires en carton. Petit progrès mais qui ne fut guère plus apprécié… Ce ne fut que bien plus tard qu’apparurent quelques rares figurines dans une matière dont il ne put déterminer la nature mais dont il se rappelle encore que les couleurs migrèrent très rapidement sur ses doigts et disparurent. Il eut aussi envie d’un « meccano », jeu de construction mécanique assez élaboré et coûteux, il n’en eut qu’un ersatz très simplifié d’une marque inconnue (« Trix ») et dont il ne parvint pas vraiment à réaliser les exemples proposés dans le « mode d’emploi ». Il voulut un modèle réduit d’avion (et « qui vole » !), il reçut un assemblage très fragile de bois et de papier avec un moteur à élastique, difficile à monter, qui ne vola jamais et se brisa immédiatement. Quand il fut un peu plus grand, il désira une bicyclette, on lui trouva un vieil engin de Saint-Etienne, tout en courbes (un vélo « de fille ») à « rétropédalage »… Il se demanda, offusqué, où le père Noël (« le petit Jésus ») avait bien pu dégoter une telle pièce de musée, qui lui donna pourtant entière satisfaction car il s’en servit longtemps. La réputation de la marque était confirmée…
La marque… En effet, dès que Jean-Marc sut lire, il distingua les annotations, du style « made in France » et sa croyance en toute intervention magique ou semi-divine (dans l'industrie du jouet...) disparut définitivement. Cette « révélation », fort rationnelle, l’attrista… Un enfant a besoin d’un certain mystère…
Tous ces déboires, (qu’il ne fut pas seul à supporter, sa sœur se vit souvent dotée de poupées en chiffon ou de dinettes en carton) ne provoquèrent chez lui aucune ressentiment à l’encontre de sa famille. Quand il recevait ces cadeaux malencontreux, il parvenait à cacher sa déception.
Ses parents d’ailleurs, il le savait, auraient aussi aimé posséder certains objets, en particulier un poste de radio. Ils attendirent fort longtemps avant de s’en voir offrir un (une modeste occasion) par un grand-oncle parisien…

Souvenirs dérisoires d’une enfance heureuse ?


 

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